Voici
venu le moment de casser les murs que nous avons érigés à l’intérieur de nos
sociétés pour créer des groupes de concitoyens qui ne se parlent plus, ne se
connaissent plus, ne se comprennent plus, ne se croisent plus, ne parlent plus
la même langue, ne partagent plus de valeur commune et ne croient pas à la
possibilité d’un présent et d’un futur construits ensemble. Le moment de casser nos réflexes élitistes.
Le
moment de nous remettre en cause, nous qui avons eu la chance de naître au sein
de familles où on mange à sa faim, où on parle la langue officielle du pays qui
est aussi celle des élites, où les parents ont les moyens d’envoyer leurs
enfants à l’école puis à l’université. Nous qui avons la possibilité de
voyager, de découvrir le reste du monde, alors que la très grande majorité de
nos concitoyens ne peuvent l’imaginer qu’à partir des images que leur renvoient
les chaînes de télévision et l’Internet, et qui projettent quelques milliers
d’entre eux sur les routes terrestres et maritimes des migrations mortelles.
Voici
venu le temps de la remise en cause de nos certitudes tout en assumant et en
défendant les valeurs de liberté, de solidarité, de justice, de modération et
de respect de la diversité, qui ne sont la propriété d’aucun continent,
d’aucune civilisation. Le temps de choisir clairement le camp de celles et de
ceux qui ne se contentent pas de rêver d’une autre Afrique de l’Ouest et d’une
autre Afrique, mais qui se proposent d’y travailler concrètement, patiemment et
résolument.
Choisir le camp de celles et de ceux qui ne voient pas seulement
les problèmes, les tares, les drames, tous réels et graves, qui assaillent
leurs pays et leurs sociétés mais qui apprécient avec la même justesse
l’ampleur des efforts accomplis tous les jours par des femmes et des hommes
d’un courage et d’une bonne volonté exceptionnels, ainsi que la formidable
énergie créatrice des générations actuelles et le potentiel encore plus immense
des générations futures.
Rêver
à nouveau, en Afrique de l’Ouest et en Afrique, de grandes réalisations
collectives. Rêver d’un autre présent,
et surtout, d’un autre futur que celui qu’on entrevoit. Rêver la nuit mais se
réveiller le jour, et le rester aussi longtemps que possible, pour regarder les
sociétés ouest-africaines telles qu’elles sont aujourd’hui. Se réveiller pour décrypter
les tendances politiques, sécuritaires, économiques, sociétales, telles
qu’elles se dessinent en prolongeant les réalités du présent et en convoquant toutes
les connaissances sans cesse renouvelées par les efforts universels de l’esprit
humain, plus accessibles aujourd’hui que jamais.
Regarder les réalités de nos
pays telles qu’elles sont pour pouvoir concentrer notre énergie, notre temps,
notre créativité, notre intelligence collective sur les questions les plus
cruciales pour l’avenir, pour celui des dizaines de millions de jeunes qui sont
déjà là et pour les cohortes encore plus nombreuses qui les rejoindront au cours
des prochaines années.
Penser
et agir ensemble pour changer le présent et l’avenir. C’est l’ambition
démesurée du WATHI, libre variation sur le thème de waati qui en langue bamanakan ou bambara, évoque le temps. Le temps
de l’urgence qui procure l’adrénaline nécessaire à l’action et le temps de la longue
durée qui permet de changer le monde en donnant à l’action collective une profondeur
et une portée qui transcendent nos ambitions individuelles insignifiantes.
Laboratoire
d’idées et boîte à outils ouverts aux contributions de toutes les femmes et de
tous les hommes concernés par l’état actuel et l’avenir d’une Afrique de
l’Ouest qui sait son sort lié à celui de toutes les autres régions du
continent, le WATHI est d’abord et avant tout un état d’esprit. Un état
d’esprit fait de réalisme, d’idéalisme, de confiance et d’entrain. L’état
d’esprit qui permettra de changer l’Afrique sans avoir peur de perdre nos
identités plurielles.
Cela semble toujours impossible jusqu’à ce
qu’on le fasse (Nelson
Mandela, 1918-2013)
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